MaPrimeRénov' : le ministre de l'Économie confirme la suspension du dispositif, mais pas pour « faire une économie en cachette »

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Trop de demandes et de tentatives de fraudes : le dispositif d'aides à la rénovation énergétique MaPrimeRénov' va bien être suspendu cet été, a confirmé mercredi le ministre de l'Économie Eric Lombard, qui veut le rétablir "avant la fin de l'année".

Surcharge des services instructeurs

Sur MaPrimeRénov', "il y a à la fois un encombrement en ce moment et un excès des fraudes (...) sur lequel nous voulons reprendre la main, d'où la suspension", a-t-il déclaré lors des questions au gouvernement au Sénat.

"Mais naturellement, une fois que cela sera réglé, le processus pourra continuer", a ajouté M. Lombard, en précisant ultérieurement, devant la commission des Affaires économiques du Sénat, que le gouvernement avait "bien l'intention de rétablir le fonctionnement avant la fin de l'année".

Le nombre de logements rénovés avec des subventions de MaPrimeRénov' a triplé au premier trimestre par rapport à la même période de 2024, alors que le budget prévu par l'État pour 2025 avait été réduit.

"Cet afflux de dossiers couplés au retard d'adoption du projet de loi de finances 2025 entraîne une surcharge des services instructeurs et un allongement des délais d'engagement", indiquait le gouvernement mardi, après la publication d'un article du Parisien évoquant la suspension du dispositif.

12% de dossiers « suspicieux »

Le gouvernement entend aussi faire la chasse aux dossiers "suspicieux", au nombre de "16 000", soit "12% du stock", selon M. Lombard.

"Il ne s'agit pas de faire une économie en cachette comme ça, en bloquant le système", a cependant assuré le ministre, reconnaissant l'importance du dispositif pour les artisans, et alors que le gouvernement cherche 40 milliards d'euros d'économies. "Il n'y a pas de sujet budgétaire. On a prévu au budget 3,6 milliards et on a dépensé pour le moment 1,3 milliard", a-t-il détaillé devant les sénateurs de la commission des Affaires économiques.

Pourtant, de nombreuses collectivités territoriales, dont la Meuse, l'Ardèche, la métropole de Lyon, ont épuisé leur enveloppe budgétaire MaPrimeRénov', destinée aux ménages modestes et très modestes pour la rénovation globale de leurs logements.

Sept d'entre elles ont écrit début mai au ministère chargé du Logement pour alerter sur une "situation de blocage", disant "faire face à une explosion des demandes d'aides et à une insuffisance des crédits Anah (Agence nationale de l'habitat) alloués".

« Ce gouvernement bascule dans l'absurde »

La ministre chargée du Logement Valérie Létard a confirmé dans un communiqué "la fermeture temporaire cet été des dépôts des dossiers pour la rénovation globale individuelle et pour les travaux individuels d'isolation ou de changement de système de chauffage". Ils pourront être de nouveau déposés "d'ici la fin du mois de septembre", a-t-elle promis.

Dans l'intervalle, ceux déjà présentés, s'ils sont "non frauduleux", seront "instruits" et donneront lieu à paiement "dans les meilleurs délais", a assuré la ministre.

Le collectif Rénovons, qui réunit des associations du secteur du logement et des fédérations de professionnels de la rénovation, a dénoncé dans un communiqué le "non-sens total" de la décision gouvernementale. Une pause de MaPrimeRénov' va briser "l'élan des ménages engagés dans un parcours de rénovation énergétique qui espèrent pouvoir améliorer" leur confort et réduire leurs factures d'énergie, estime ce collectif.

"Suspendre une aide indispensable aux ménages modestes... parce qu'elle marche ! Ce gouvernement bascule dans l'absurde. Rappel : pendant que vous faites vos comptes d'apothicaires, 10 000 personnes meurent de froid chaque année et 5 000 de chaud...", a dénoncé Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation pour le logement (ex-Fondation Abbé Pierre).

La suspension porte "préjudice à une filière", selon Rénovons. Le secteur est las du "stop-and-go" et des changements intempestifs de cadre réglementaire. "Les entreprises artisanales du bâtiment ont besoin de visibilité et de stabilité, en particulier dans ce contexte économique compliqué où leur activité et leur trésorerie sont fragilisées", a souligné Jean-Christophe Repon, président de la Capeb, le syndicat des artisans du bâtiment.

Commentaires

GV
Le gouvernement cherche à faire 40 milliards d'économie et, comme souvent, le secteur du logement est la variable d'ajustement pour y parvenir. Les décideurs au plus au niveau n'ont aucune volonté de faire du secteur de la rénovation énergétique le fer de lance de la relance industrielle et économique en France. Objectif qui par la même occasion permettrait aux habitants d’améliorer leur confort et leur pouvoir d’achat. Mais non, les crédits sont réduits au motif que l’an dernier ils n’ont pas tous été consommés. Aucune volonté de monter en puissance, d’atteindre les objectifs de rénovation d’ampleur et de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
La filière de la rénovation énergétique est régulièrement bousculée par les changements sur les aides, ces stop & go. Pourtant depuis plusieurs années, les pros réclament d'avantage de soutien et de la stabilité, d'où l'actuelle goutte de mécontentement qui fait déborder le vase de la colère accumulée. Beaucoup d’entreprise du bâtiment mettent la clé sous la porte car elles ne parviennent plus à avancer la trésorerie pour des aides qui sont versées avec des délais non raisonnables.
Les attaques sur l’écologie ces derniers jours sont insupportables (fin des ZFE, retour des néonicotinoïdes, forte limitation des ZAN, reprise de l’A69…). Sarkozy avec son « l’écologie ça commence à bien faire » était tout aussi détestable mais au moins plus direct. Là ce n’est même pas assumé.

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