- Connaissance des Énergies avec AFP
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L'un penche pour des frappes militaires, l'autre privilégie les négociations : Israël et les États-Unis peinent à accorder leurs violons sur la question du nucléaire iranien, devenu sujet de crispation entre les deux pays traditionnellement proches alliés.
« Opérations militaires »
Alors que s'ouvrait à Mascate dimanche un quatrième cycle d'échanges indirects entre l'Iran et les États-Unis, le ministre des Affaires étrangères israélien, Gideon Saar, martelait qu'il était hors de question de laisser Téhéran développer son programme nucléaire.
"Le régime le plus dangereux ne doit en aucun cas obtenir l'arme la plus dangereuse au monde", a déclaré M. Saar. Israël, comme les pays occidentaux, soupçonne l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces allégations, défendant un droit au nucléaire civil.
Si elles ne le clament pas haut et fort, les autorités israéliennes sont généralement perçues comme prônant une stratégie militaire contre l'ennemi juré iranien.
"Si des opérations militaires sont nécessaires (...), qu'il en soit ainsi", a déclaré le président israélien, Isaac Herzog, dans une interview publiée cette semaine par le journal allemand Die Welt, tout en affirmant qu'il souhaitait donner "une chance au dialogue".
De l'uranium enrichi jusqu'à 60%
En 2015, l'Iran et plusieurs puissances ont signé un accord encadrant le développement nucléaire par Téhéran, notamment l'enrichissement d'uranium, en échange d'une levée progressive des sanctions dont le pays était l'objet depuis le mitan des années 2000.
Mais en 2018, les États-Unis, sous le premier mandat de Donald Trump, se sont retirés de cet accord, rendant le texte largement inopérant. Depuis, l'Iran a repris une grande partie de ses activités nucléaires.
Le pays enrichit désormais de l'uranium jusqu'à 60%, bien au-dessus du plafond de 3,67% fixé par l'accord, mais en deçà du seuil des 90% nécessaires à la fabrication de l'arme atomique, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).
Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a initié de nouveaux pourparlers qui ne sont pas du goût d'Israël, où l'on dit les autorités également irritées par un autre accord conclu dans leur dos entre Washington et les rebelles houthis au Yémen.
« L'accord qui marche vraiment »
"Israël insiste pour que l'accord soit bien plus complet (qu'en 2015, NDLR) et que l'Iran ne soit pas autorisé à enrichir de l'uranium domestiquement", souligne l'analyste en géopolitique Michael Horowitz.
Selon lui, les autorités israéliennes estiment aujourd'hui que "Téhéran peut très rapidement développer une arme s'il le décide".
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, qui avait applaudi en 2018 la dénonciation de l'accord sur le nucléaire iranien par le président américain, martèle qu'Israël est prêt à user de tous les moyens pour arrêter la République islamique.
"L'accord qui marche vraiment est celui qui élimine la capacité de l'Iran à enrichir de l'uranium à des fins d'armement nucléaire", a-t-il déclaré fin avril, exhortant à "démanteler" ce programme nucléaire.
"Il y a actuellement de nombreuses voix en Israël qui suggèrent qu'il existe une fenêtre d'opportunité pour recourir à la force militaire si nécessaire", explique Raz Zimmt, directeur des recherche sur l'Iran à l'Institut pour les études de sécurité nationale (INSS).
Selon lui, l'idée de frappes sur des infrastructures iraniennes est motivée par deux facteurs: la perception de l'Iran comme affaibli après qu'Israël a visé ses systèmes de défense en octobre 2024, et le fait que le Hezbollah, le mouvement chiite libanais, soit également diminué après la guerre qui l'a opposé à Israël en 2024, et donc "incapable de riposter" pour défendre Téhéran, son grand allié.
« Embarras » diplomatique
De l'avis des experts interrogés par l'AFP, si Israël venait à décider de frapper des sites iraniens liés au programme nucléaire, les États-Unis seraient sollicités, a minima pour se maintenir prêts à défendre le pays en cas de riposte iranienne.
"Une frappe avec le soutien ou même la participation de Washington peut être bien plus efficace", indique M. Horowitz. "Les positions de Trump mettent Israël dans l'embarras : il ne veut pas se mettre en porte-à-faux avec la nouvelle administration, mais commence à comprendre que Trump veut un accord coûte que coûte".
"Il est très improbable que Netanyahu s'oppose à Trump" si ce dernier signe un accord avec l'Iran, abonde M. Zimmt.